C’est probablement en matière d’urbanisme que la municipalité a le plus de cartes en main : rénovation des bâtiments existants, règles plus contraignantes pour la construction de nouveaux bâtiments, végétalisation, perméabilisation des sols, et même de façon plus globale, l’organisation de la ville et sa gouvernance. Par les choix que la ville fait en matière d’urbanisme, elle agit sur plusieurs fronts :
son bilan carbone : en renforçant l’isolation thermique des bâtiments, en optimisant les systèmes de chauffage et climatisation, en optant pour des sources d’énergies bas carbone
la protection de sa population : en limitant l’impact des phénomènes extrêmes (canicules, fortes précipitations, inondations, feux de forêts… )
la protection de l’environnement : en favorisant le maintien de la biodiversité, par une meilleure gestion de notre patrimoine forestier, de nos ressources en eau, ...
Protéger les Sévriens
Samedi 18 juin 2022 a été le jour de juin le plus chaud jamais enregistré en France depuis que la météo existe. Certains ne voudraient y voir qu’un phénomène exceptionnel. Mais les experts du GIEC n’ont cessé de nous alerter sur l’effet que le réchauffement peut avoir sur les phénomènes climatiques : en particulier, des épisodes de chaleur plus intenses, plus précoces et plus fréquents. Ainsi, selon le CNRS, la France a connu 26 vagues de chaleur en 20 ans entre 2000 et 2020, contre 17 en plus de 50 ans, entre 1947 et 2000. Leur fréquence a donc déjà quadruplé !
Si les canicules frappent l’ensemble du territoire, elles sont particulièrement difficiles à supporter dans les villes où la température de l’air est plus élevée que dans les campagnes. C’est ce qu’on appelle les îlots de chaleur urbains (ICU).
Quelles en sont les causes :
· La chaleur stockée dans les matériaux urbains comme le béton, l’asphalte, ou le bitume qui absorbent le rayonnement solaire.
· La chaleur dues aux activités humaines : les moteurs des machines et des véhicules (particulièrement quand ils utilisent la climatisation, mais pas seulement).
· La faible végétalisation des centres ville. Le végétal agit à plusieurs niveaux : il capte une partie du rayonnement solaire par sa photosynthèse. Il crée de l’ombre. Et il rafraichit l’air par son évapotranspiration.
· Les formes architecturales qui peuvent ralentir les vents et aggraver la sensation de chaleur.
Les ICU peuvent faire monter la température par endroits de 7 à 8°C. Selon Santé Publique France, la mortalité, pendant la canicule de 2003, était le double dans les quartiers les plus exposés aux fortes chaleurs.
Protéger les populations des chaleurs extrêmes est un des aspects majeurs de la résilience d’une ville. C’est une absolue nécessité porteuse également de nombreux avantages en termes de santé, de bien-être, de productivité, de qualité de l'air et même de système énergétique. A l’inverse, ne rien faire ajoutera aux difficultés observées : non seulement cela nuira à la santé des Sévriens et rendra la ville moins agréable, mais déclenchera une hausse des consommations énergétiques pour rafraichir les bâtiments, créant un cercle vicieux car la climatisation ne fera qu’accroitre la température urbaine (jusqu’à +2°C en moyenne).
Le sujet n’est pas nouveau et il existe aussi bien des organismes experts dans l’identification des zones de chaleur que dans la façon de les combattre. Les solutions sont connues :
· Accroitre la présence de l’eau dans l’espace public : fontaines, bassins (récupération d’eau de pluie), brumisateurs publics, …
· Végétaliser partout où c’est possible : les espaces publics bien sûr, les cours d’école, mais aussi les toits et les façades
· Créer des zones d’ombre
· Changer l’albédo (pouvoir réfléchissant) des sols, des façades et des toitures
· Renforcer l’isolation des bâtiments pour éviter qu’ils deviennent eux-mêmes une source de concentration de chaleur
· Là où c’est encore possible, organiser la circulation des vents
· Favoriser les mobilités douces
Dans une étude de la Banque Mondiale on apprend ainsi que
· La plantation massive d'arbres dans les rues peut refroidir l’air de 0,4 à 3 degrés avec un refroidissement optimal dans un rayon de 30 m autour de l’arbre
· 10 % d'augmentation de l’albedo réduit de presque 1°C les pics de chaleur
· Le déploiement de toits végétalisés peut réduire la température jusqu'à 3 degrés
· Accroitre la vitesse du vent de 1,5m/s peut réduire la température de 2°C
· …
En combinant ces mesures, certaines villes arrivent à baisser de 6°C la température moyenne lors des canicules.
Mais la mise en œuvre de ces solutions ne s’improvise pas. Certaines mesures s’appliquent mieux à certains endroits qu'à d’autres. Il convient aussi de prendre en compte l’ensemble des bénéfices et des coûts et impacts négatifs quand il y en a (ressource en eau nécessaire à la végétation). Cela nécessite un travail d’analyse et de réflexion. Et, une fois mises en place, ces mesures peuvent nécessiter du temps avant d'être efficace (croissance de la végétation par exemple). Il n’y a donc plus une seconde à perdre.
A suivre ...
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