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La "saga" du cœur de ville de Sèvres

Dernière mise à jour : 9 oct. 2023



Cet été a vu un nouvel épisode dans la saga de la « requalification » du cœur de ville de Sèvres. Un nouveau projet a été présenté aux Sévrien(ne)s et une nouvelle "concertation" mise en place.

Initiée en 2016, la requalification du coeur de ville de Sèvres a déjà fait l’objet de 2 projets, l’un en 2017, l’autre en 2021.

Le premier avait été présenté aux Sévriens avant d'avoir les accords nécessaires à la destruction du commissariat sur laquelle il se fondait. Sans ces accords il dût être abandonné. Et cela après que 4500 Sévriens aient pris le temps de participer aux consultations et de voter sur les différentes options présentées.

Le deuxième qui déplaçait le marché Saint Romain dans les locaux de l’ancienne Poste, a été introduit dans une consultation a l’été 2021 sans que sa faisabilité ait été sérieusement étudiée. La consultation qui portait essentiellement sur des choix esthétiques, laissait à penser que le projet était mûr alors qu’il n’était qu’approximations et dût aussi être abandonné.


Celui présenté cet été échappera-t-il à la règle ?

Sur le papier, son aspect est séduisant. C’est du moins la première réaction à la vue des jolies esquisses du dépliant de 4 pages imprimé pour la consultation. Et c’est inévitablement ce qu’a exprimé le petit panel de personnes interrogées pendant l’été dont le compte-rendu, sous forme de vidéo, a fourni les seuls résultats présentés lors de la réunion publique du 12 septembre dernier. Mais les esquisses sont trompeuses (cf notre Jeu des 7 erreurs) et les réactions à chaud de quelques personnes ne reflètent pas le jugement des Sévrien(ne)s qui ont pris le temps de réfléchir et de faire part de leurs observations pendant l'été sur les registres ouverts à cet effet, en ligne et à la mairie ***. Pourtant, aucune restitution du contenu de ces registres n'a été présentée lors de la réunion publique, contrairement à ce que l'on était en droit d'attendre !



Déception des participants à la réunion publique du 12 septembre qui s'attendaient à juste titre à ce qu'on leur présente les résultats de la concertation. Aucune restitution des contributions *** faites sur les registres


C’est bien dommage car nombre de ces observations convergeaient sur différents points que nous tentons de synthétiser ici :

  • L’aberration de supprimer le pont du 8 mai 1945, en dépit de son utilité actuelle évidente, sous le seul prétexte qu’il n’est pas beau. Certains proposent qu’on le garde et qu’on l’embellisse, d’autres qu’il soit au minimum remplacé par une passerelle pour les piétons et vélos. Notre préférence va à l’embellissement. Cela coutera moins cher, sera plus écologique et il faut au minimum que la passerelle puisse aussi être emprunté par les transports publics. Nous militons depuis des années pour que Sèvres se dote d’un réseau de navettes électriques gratuites qui desservent les gares. L’accès facilité des bus à la gare de Sèvres Rive Gauche doit rester une priorité. Sans compter que cette suppression ne manquera pas de créer des ralentissements supplémentaires sur le rond-point de la mairie. Notons d’ailleurs que lors du 1er projet en 2017, il avait clairement été indiqué que la suppression de ce pont n’était pas envisageable du fait de son utilité avérée. Notons aussi qu’en réponse aux inquiétudes des piétons quant à cette suppression, le maire a évoqué avec beaucoup de facilité la possibilité de construction d’un ascenseur ou d’un escalator, alors que nous attendons toujours l’escalator pour l’accès à la gare de Sèvres RG qui figurait dans son programme en 2014 !. Une excellente idée au demeurant car la montée vers cette gare est particulièrement fatigante et inadaptée. Et c’est une des clés d’avenir pour aider les Sévriens à moins utiliser leur voiture.

  • La construction d’un nouveau marché à l’emplacement de la station BP. Disons-le, les vues qui nous ont été présentées sont séduisantes, mais à quel prix ? Tout d’abord purement financier : celui d’un dédommagement de la station BP, coût dont nous n’avons toujours pas connaissance. Interrogé par un participant lors de la consultation du 12 septembre le maire n’a pas souhaité répondre. Bel exemple de transparence ! Puis le coût de la dépollution, dont nous n’avons pas non plus le détail ni la durée. Le coût de suppression du pont. Sans cette suppression, on nous dit qu’il n’y aura pas assez de place pour cet immeuble et surtout pour assurer les chargements et déchargements de marchandises propres au marché. Le coût de construction d’une deuxième voie d’accès au rond-point. Enfin le coût de construction de l’immeuble. Pas de détail là non plus. Et l’aspect financier n’est pas le seul élément qui doit nous faire réfléchir. Tant que cet immeuble n’aura pas été construit, il ne sera pas possible de supprimer le marché Saint Romain, et la rénovation des espaces compris entre la partie commerçante de Grande Rue et l’avenue de l’Europe ne sera pas entreprise. Le fameux « îlot de fraicheur » mis en avant dans la communication récente sur cette requalification ne verra le jour au mieux qu’en 2032, dans 9 ans ! Qui en seront certainement 12 ou 15 si l’on en juge par les retards généralement observés dans ce type de projet.

Le calendrier du projet présenté à la réunion publique et qu'on s'est bien gardé de faire figurer dans le dépliant de la concertation. La grande majorité de Sévrien(ne)s souhaitent une rénovation du centre-ville mais dans combien d’années encore et pour combien d'années de travaux ? Ceux qui ont emprunté la rue de Ville d'Avray cet été comprendront. De nombreuses voix se sont donc élevées, lors de cette concertation, contre le déplacement du marché Saint Romain. Certains souhaitent une rénovation du marché existant y compris une réduction de son emprise, d’autres sa transformation en marché non couvert. Certains font remarquer que son déplacement pourrait nuire à sa fréquentation et celle des boutiques voisines. Une participante nous a rappelé que le SEL abritait l’ancien marché couvert de Sèvres et qu’il avait été déplacé car jugé pas assez central. Certains le jugent particulièrement accidentogène car il concentrera après la suppression du pont du 8 mai, l'ajout d'une voie vers le rond point et les chargement et déchargements des commerçants un trafic important brassant pétons, cyclistes, voitures et camions. Nombreux s’interrogent sur la légitimité de cet objectif au regard de son coût exorbitant et du faible pourcentage de Sévriens qui fréquentent régulièrement le marché actuel.

  • La suppression de la station BP : cette décision a été prise il y a longtemps déjà et quel qu’en soit le coût il faut faire avec. Comme un fait exprès cependant, Total vient d’annoncer qu’ils allaient fermer la station d’essence de Chaville (484 avenue Roger Salengro) et la transformer en station pour véhicules électriques ! Puisque c’est acquis, sans détruire le pont et investir des sommes déraisonnables dans le déplacement du marché, pourquoi ne pas en faire un espace vert et ouvrir cet espace jusqu’à l’église, offrant ainsi la perspective mise en avant dans la destruction du pont.

  • La plupart des participants se sont étonnés de devoir se prononcer sur un projet d’une telle ampleur à partir de simples croquis d’ensemble sans aucune explication ou détail des transformations qui seront opérées. Une liste d’études achevées a été donnée lors de la réunion publique du 12 septembre. Nous avons officiellement demandé le 27 septembre par email à Monsieur le Maire d’avoir accès à la l’ensemble des études « achevées » concernant ce projet. Pour le moment, la seule réponse qui nous a été faite par oral en séance du conseil municipal le lendemain c’est que nous n’en avions pas besoin pour délibérer ! Nous restons en attente de ces documents.

Beaucoup d'études en 7 ans pour un projet qui n'en est encore qu'au stade des esquisses.Nous demandons à pouvoir les consulter


Dans les registres, beaucoup des commentaires de bon sens dénoncent le gigantisme du projet : plus de 40 M€ d’argent public, nos impôts, pour faire principalement de l’îlot du cœur de ville un endroit attractif ? Certes sa rénovation est indispensable. Elle est même urgente. Dans l’attente de ce projet qui ne vient pas, cet espace public n’est plus entretenu et se détériore. Il est indigne d’une ville de la qualité et de la renommée de Sèvres. Déjà, nous avions fait de cette rénovation une des priorités de notre action en matière d’urbanisme dans notre programme aux municipales de 2020. Si l’on adopte le 3ème projet dévoilé cet été, cette rénovation ne verra pas le jour avant, au minimum, une dizaine d’années encore. Les premiers concernés, les commerçants du marché n’y croient plus.

Pourtant, avec probablement moins de 5 millions d’euros, on pourrait rénover en peu de temps le marché actuel et tous les espaces qui l’entourent. 234k € ont déjà été dépensés pour les études et consultations des 3 projets qui nous ont été présentés en 7 ans. On peut bien en dépenser 15 ou 20 pour étudier cette rénovation. On pourrait par exemple lancer un concours d’architecte sur référence, ce qui permettrait d’obtenir rapidement des visions différentes de la meilleure façon de mener cette rénovation. On pourrait aussi mener une réflexion plus large sur les espaces publics qui ont besoin d’une rénovation à Sèvres car cela ne se limite pas au seul cœur de ville.

L’attente et l’immobilisme coutent cher à la ville de Sèvres : depuis la vente de la SEMI en 2017, la majorité municipale a mis de côté 20M€ pour cette rénovation. 20M€ qui ne servent pas les autres besoins à Sèvres et dont la valeur en termes d’investissement n’a cessé de fondre. En seulement 2 ans les coûts du BTP ont augmenté de 30% et il est difficile de croire que cela va s’arrêter car la crise énergétique que la guerre en Ukraine a révélé a des racines plus profondes que sont la finitude des ressources de notre planète. L’inflation, la flambée des prix des matériaux de construction à laquelle nous assistons n’est qu’un début. Les rendements des gisements se réduisent. Les couts d’extraction augmentent. Les coûts de transformation vont suivre. La protection du climat va, en outre, contraindre les entreprises à modifier leurs activités et particulièrement leurs processus de production pour améliorer leur bilan carbone. La fabrication du ciment et de l’acier sont d’énormes générateurs de CO². Qui peut dire que les 40M€ consacrés à ce projet n’en seront pas 50 ou plus quand il sera achevé ?

L’attente c’est aussi des locaux rachetés par la ville depuis quatre ans (Carrefour Bio, les anciens locaux de la CPAM, de La Poste, le Tabac de la mairie) qui restent et vont rester vides alors qu’ils pourraient rendre des services aux Sévriens via les associations ou d’autres acteurs locaux.


Sur le plan strictement financier, le tableau n’est guère plus optimiste. Comme elle le fait encore dans la tribune du Sévrien d’octobre 2023, la majorité municipale se plaint régulièrement de l’accroissement de ses charges et la baisse de ses ressources. Elle a ainsi choisi d’augmenter la taxe foncière à Sèvres de 25% en 2023 pour contrer le doublement de sa facture énergétique. Elle a aussi baissé ses subventions aux associations. Or la crise énergétique et l’inflation générale ne vont pas manquer d’aggraver cette situation. Quelle prochaine hausse de taxe et/ou réduction de service seront utilisées pour y faire face. On nous dit qu’il n’y en aura pas. Rien n’est moins sûr.


Résumons : d’un côté, la ville augmente ses taxes et réduit ses charges (donc ses services sinon que dire de la gestion de la ville jusqu’à cette réduction ?), de l’autre elle s’engage dans un projet immobilier qui mobilise toutes ses provisions et la contraint à maintenir un taux élevé de profit de fonctionnement. La municipalité a ainsi choisi d’accroitre son profit de fonctionnement dans le budget 2023 de 9,4 million d'euros contre 8,9 millions l'an dernier.

Ce projet s’il se confirme, prendra le pas sur les autres besoins d’urbanisme. Or nous sommes entrés dans une ère critique où les priorités ne sont plus seulement esthétiques. Il faut penser à la résilience de la ville. La facture énergétique a doublé en 2 ans : comment la réduire de façon significative ? Les canicules se font plus fortes et plus fréquentes : où et comment réduire la température ressentie dans la ville. Les précipitations vont s’intensifier : y-a-t-il des risques à anticiper à Sèvres ? Il faudra moins utiliser sa voiture : que fait-on pour aider les Sévrien(ne)s à se déplacer ? De façon générale, qu’est-ce que va faire Sèvres pour réduire son bilan carbone et aider sa population à faire de même. Notons qu’aucune étude d’impact carbone n’a été à incluse dans ce projet. Et Sèvres n'a toujours ni bilan carbone ni objectif de réduction associé.


Notre proposition, qui rejoint la préoccupation de bien des participants à la consultation, est d’adopter un projet d'embellissement durable moins onéreux du coeur de ville et de l’étendre à d’autres espaces publics (les autres places de Sèvres, le pont du 8 mai …). Dans le contexte actuel il paraît peu sensé d’envisager un projet de rénovation d’un centre-ville sans l’inscrire dans un schéma plus large de transformation de la ville pour faire face aux crises climatiques et énergétiques. Et le temps presse. Ni les Sévrien(ne)s ni la planète ne pourront attendre les 10 ans ou plus qui nous sont proposés.

Engagées rapidement, ces transformations accroitront l'attractivité de Sèvres, son développement économique, commercial et touristique générant de nouveaux emplois et un nouveau dynamisme pour la ville. Les 20 M€ mis de côté depuis 2017 serviront amplement ces objectifs. Des fonds seront disponibles pour servir d’autres besoins mis en attente : infrastructures sportives , locaux associatifs,… Les économies réalisées permettront de mieux aider les associations au quotidien, de baisser les tarifs des services et des activités sportives et culturelles pour les moins favorisés, de développer plus d’activité pour la population estudiantine et internationale pour qui Sèvres se résume souvent à une ville dortoir.



*** Les registres de la consultation comptaient 149 contributions en date du 12 septembre selon GPSO et presque 200 le 15 septembre car beaucoup de Sévriens se sont exprimés, et de façon plutôt défavorable, à la suite de la réunion du 12 septembre. Nous posons d’ailleurs la question : pourquoi ces registres ne sont-ils plus accessibles aujourd'hui ? Le projet n’en est qu’à son tout début. Cet accès a été supprimé dès le 15 septembre 2023, qui plus est à 17h, alors que la concertation ne se terminait qu’à minuit ?!?


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